Astérisques et obélisques

Extrait du livre de Philippe Dessouliers : « 50 dictées commentées », un livre à recommander pour tous les aficionados de l'orthographe.


« À la forêt de Brocéliande, mènes-y-moi, s'il te plaît, allez, emmène-m'y », m'avait-il demandé à moult reprises, alors qu'il dévorait une bédé (BD, B.D.) tout entière et les trois quarts de son dessert préféré, un kouign-amann très caramélisé.
Nous habitions alors le pays bigouden, mais j'étais à cent lieues de penser qu'il pût s'intéresser à cette futaie peuplée de korrigans, et dans laquelle vécut Merlin qui m'avait toujours enchantée parce qu'il avait permis à un jeune garçon d'acquérir la bien nommée Excalibur, son estramaçon bien-aimé.
« C'est le domaine des dolmens, lui avais-je alors susurré à l'oreille, tu sais, ces mégalithes mystérieux. Certains menhirs sont aussi imposants que des obélisques ventrus, et l'on raconte même qu'au fin fond de cette forêt féerique (féérique), se trouve un ennéagone formé de peulvens décorés d'étoiles pareilles à des astérisques parfaitement ciselés. Des on-dit malintentionnés prétendent que ce cromlech fut édifié par des Romains rendus fous après que le druide de la tribu, l'ovate aux vertus thaumaturges, leur eut administré une raclée. L'eubage aurait en effet concocté une thériaque aux pouvoirs surnaturels, surhumains. C'est que les Gaulois voulaient être invulnérables car ils craignaient que le ciel ne leur tombât sur la tête. »
Le garçon leva la tête de son livre et quoique coi jusqu'alors, me répondit, narquois : « Eh quoi, maman, c'était leur idée fixe ! Eux aussi ils voulaient leur assurance tous risques ! »

 

Philippe Dessouliers
Dico de bronze 2002